Après les États-Unis, Israël et le Canada, l’Agence européenne du médicament vient d’approuver le vaccin pour les 5-11 ans. Une validation attendue par les pédiatres et les gouvernants d’autres pays. Mais, comme l’an dernier, la France temporise, aucune décision sur le sujet ne serait prise avant début 2022.
Dans cet attentisme, des sociétés savantes de pédiatrie comblent le vide en offrant une solution simple : laisser circuler le virus chez les enfants. A la vaccination, elles opposent l’alternative de l’immunisation par la maladie, affirmant qu’il est possible d’”envisager les bénéfices de l’immunité naturelle”. Un avantage pourtant qualifié de “spéculatif” par l’Académie de médecine. On savait déjà grâce au dévouement de la Société française de pédiatrie (SFP) et de sa présidente que les enfants français seraient, contre les évidences scientifiques internationales, peu contaminés et pas contaminants, d’où son opposition forcenée au port du masque à l’école primaire. Avec cette nouvelle proposition, les masques tombent, en effet.
Laisser circuler les virus chez les plus jeunes dans le but de développer l’immunité dans la population est une approche condamnée par la communauté scientifique internationale et par l’OMS, qui la juge contraire à l’éthique et sans fondement scientifique. Cette stratégie, proposée dans la “Great Barrington Déclaration”, a par ailleurs été immédiatement contestée par plus de 7000 scientifiques dans le mémorandum de John Snow paru dans The Lancet le 14 octobre 2020 et à nouveau au cours de l’été 2021. Non seulement une immunité post-infection durable et supérieure à l’immunité vaccinale n’est pas prouvée scientifiquement, mais la transmission incontrôlée chez les enfants entraînerait une augmentation de la morbidité chez les plus jeunes. On risque de créer des générations avec des problèmes de santé chroniques, avec un fort impact individuel, social et économique. En plus, cette stratégie favoriserait l’émergence de variants résistants aux vaccins, mettant tout le monde en danger.
Les autorités politiques et sanitaires oseraient-elles poursuivre cette voie ? C’est hélas possible, puisqu’une stratégie de minimisation des impacts pour les enfants a été rendue possible en France : aucune enquête officielle pour connaître le nombre d’enfants touchés par un “Covid long”, une liste des symptômes évocateurs trop restrictive et non actualisée, un dépistage défaillant et insuffisant en milieu scolaire, une recommandation de ne pas tester en première intention les enfants de moins de 6 ans (ce qui d’ailleurs devrait tous nous interpeller sur l’actuelle épidémie de bronchiolite, étrangement plus précoce et plus virulente que dans le passé)….
Des données insuffisantes, un manque de transparence et une communication rassuriste à l’intention de parents souvent démunis, cherchent à imposer l’idée que l’infection au Sars-Cov-2 est bénigne pour les enfants et ne justifie pas des mesures de prévention adéquates. Ces mesures seraient même, selon la SFP, délétères pour la santé mentale, dans une vision très simpliste et qui oublie son caractère indissociable de la santé physique. Le déni ou la psychologisation du Covid long pédiatrique, en plus d’augmenter probablement les chiffres des prises en charges pédopsychiatriques, alimentent le fantasme de l’enfant non concerné par le Covid-19. Ce mythe a été rendu possible par le caractère asymptomatique d’une majorité d’infections, par le faible nombre de décès et par la comparaison avec les adultes.
Mais les failles de cette fable sont nombreuses.
Les infections, même asymptomatiques, peuvent avoir des conséquences à long terme. Les preuves de séquelles neurologiques, de phénomènes qui pourraient prédisposer certains malades à développer des troubles neurodégénératifs, voire des démences, s’accumulent.
Focaliser sur le taux de mortalité, c’est ignorer le risque d’handicap ou de dommages aux organes chez les survivants, qui peuvent compromettre la qualité et l’espérance de vie des plus jeunes.
Enfin, minimiser l’impact sur les enfants par une comparaison avec les adultes est un biais cognitif dont les experts devraient s’affranchir et les parents se préoccuper : savoir que “très peu d’enfants en mourront”, comme a déclaré la présidente de la SFP, ou faire l’hypothèse que les “Covid longs” seront plus rares que chez l’adulte, suffit-il à accepter le risque pour son enfant ? Quel serait alors le nombre acceptable de décès d’enfants et de séquelles handicapantes avant d’adopter les solutions visant à prévenir les contaminations ? Selon les données internationales, au moins 4% d’enfants infectés pourraient souffrir de “Covid long”. Avec des centaines de milliers d’enfants contaminés, et plus encore si on laisse galoper le virus dans les classes, pourra-t-on parler encore longtemps de manifestations rares ?
Exposer délibérément des enfants à un agent biologique de niveau 3 ne serait qu’une expérimentation menée sans le consentement des parents et reposant sur leur désinformation. Cette stratégie, en plus d’être une violation du droit à la protection de la santé (article L. 1110-1), est contraire aux droits fondamentaux à la vie et la santé, tels que définis par la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE), signée par la France.
Protéger les enfants est un impératif moral et un devoir de l’Etat et des parents, qui doivent être correctement informés. Et les enfants n’ont pas à être la “troisième dose” des adultes, ils ont le droit d’être protégés, par tous les moyens disponibles. Le président Macron s’y est engagé en déclarant le 28 Octobre 2020 , à propos de l’idée de laisser circuler le virus : “Jamais la France n’adoptera cette stratégie”.
En pleine cinquième vague, le moment est venu de tenir cet engagement, en rejetant fermement la proposition d’immunisation par infection des enfants, en activant un plan d’urgence pour lutter contre la circulation du virus par aérosol dans les écoles, et en prenant une décision sur la vaccination des enfants fondée sur des données scientifiques. Aucun enfant ne peut être sacrifié au nom d’intérêts politiques ou idéologiques.